L’Opération Daguet, un tournant pour l’armée française
Août 1990 : l’Irak de Saddam Hussein envahit le Koweït. Mandatée par l’ONU et menée par les États-Unis, une coalition internationale intervient pour protéger l’indépendance de la petite monarchie du Golfe. L’opération Daguet va mettre les troupes coalisées à l’épreuve pendant six mois et marquer un tournant dans l’histoire de l’armée française.
La guerre du Golfe aura-t-elle lieu ?
À l’aube des années 1990, alors qu’il sort de huit années de guerre contre l’Iran, l’Irak de Saddam Hussein possède l’armée la plus forte du monde arabe, et la quatrième plus grande au monde. Mais les finances du pays sont dans le rouge, l’Irak s’étant s’est gravement endetté pour financer la guerre contre l’Iran, lancée en 1980 par Saddam Hussein. Début 1990, ce dernier demande à l’Arabie Saoudite et au Koweït, les principaux créanciers de l’Irak, d’annuler la dette irakienne. Si le premier accepte, le second refuse catégoriquement. Un refus qui sera lourd de conséquences pour le Koweït… Sautant sur l’occasion, l’Irak, qui reproche à son voisin de produire trop de pétrole et d’être responsable de la chute des prix, envahit le Koweït le 2 août 1990.
Le jour même, l’Organisation des Nations Unies (ONU) vote la résolution 660 et exige que l’Irak se retire du Koweït. Afin de prévenir toute nouvelle invasion de la part de l’Irak, l’armée américaine déploie ses forces dans le désert d’Arabie saoudite le 6 août. C’est le début de l’Opération « Bouclier du désert » (Desert Shield), la première phase de la guerre du Golfe, à laquelle vont notamment participer l’Arabie saoudite, la Grande-Bretagne, la Syrie et l’Égypte. Le 13 août, la France lance l’opération Salamandre, qui a pour objectif de protéger le Golfe persique. L’invasion par les troupes irakiennes de l’ambassade de France au Koweït, le 14 septembre 1990, change la donne. La France décide de passer au niveau supérieur et lance l’opération « Daguet », nommée d’après la division mobilisée pour l’occasion.
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Les soldats se mettent en position de tir au LRAC (lance-roquettes antichar) de 89 mm mdl F1 lors d'un exercice. -
Gros plan de Pataugas dans le sable. -
Exercice de tir de nuit avec un fusil de précision FR-F2 muni d'un équipement de tir de nuit à intensification de lumière DIPT 9 C (lunette OB 25 C). -
Deux avions de combat Mirage 2000 au décollage sur la BA (base aérienne) d'Al Ahsa. -
Un sergent-chef de l'armée de l'Air mène un dromadaire utilisé comme ambulance du SSA (Service de santé des armées) et transportant un brancard. -
Coucher de soleil sur la station d'épuration et de distribution de l'eau tenue par les éléments du 17e RGP. L'un d'eux remplit une citerne. -
Six hélicoptères de transport Puma SA-330 des 1er et 5e RHC survolent le désert en formation groupée lors de l'héliportage de groupes de combat du 1er RI vers la zone d'opération nord. -
Moment de détente avec une partie de volley-ball dans le désert. -
Messe célébrée par le père Olive Tagliazucchi, aumônier du 2e REP, sous une tente au campement du 1er RI. -
Vue frontale du nez peint de dents de requins et du canon d'un avion d'appui rapproché Fairchild A-10 Thunderbolt-II sur le parking de la base américaine à CRK (camp du roi Khaled). -
Une sentinelle française accompagne Un bédouin qui chevauche un âne aux abords du PC (poste de commandement) divisionnaire. -
En ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, trou de combat d'un soldat du 1er RS (régiment de spahis) au repos à l'aube, qui lit ou écoute la radio. -
En ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, paysage de falaise. -
Désert rocheux. -
Caravane de dromadaires dans le désert. -
Mise en batterie d'une station Sirocco (station intégrée de radar d'observation continue des courants aérologiques) : lancement d'un ballon-sonde auquel est suspendu un réflecteur. -
En ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, le général de corps d'armée Michel Roquejeoffre, commandant en chef de l'opération Daguet, et le général de brigade Bernard Janvier, commandant la division Daguet. -
En ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, un soldat est posté en observation dans le désert, équipé de jumelles, en contre-jour au coucher de soleil. -
Alerte NBC (risque nucléaire, bactériologique et chimique) au CRK (camp du roi Khaled), les soldats, revêtus de la tenue S-3P (survêtement de protection à port permanent), descendent dans des abris souterrains. -
En ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, un soldat équipé de jumelles est posté en observation au sommet d'une butte. -
Les soldats égyptiens font leur prière sur le champ de tir, avant l'exercice de tir Milan en coopération avec les soldats français. -
Démonstration des soldats français lors d'un exercice franco-égyptien de tir sur lance-missiles Milan. Flamme produite lors du tir.
Bouclier du désert : le calme avant la tempête
Une trentaine de bateaux civils est réquisitionnée pour transporter les premiers soldats français sur le terrain d’opération. Les forces françaises traversent la Mer Rouge puis débarquent au port de Yanbu (Arabie Saoudite), avant de rejoindre la zone de déploiement de la division Daguet, situé à plus de 1 200 km à l’Est. Les soldats français s’installent au Camp du Roi Khaled (CRK) et au Camp de Miramar. Commence alors une phase d’attente de plusieurs mois durant laquelle les troupes se préparent à l’attaque et tentent de s’acclimater tant bien que mal à la vie dans le désert.
Températures extrêmes, absence de repères, difficultés pour s’approvisionner en eau et en essence… L’armée doit s’adapter à un environnement hostile auquel elle n’avait pas été confrontée depuis de nombreuses années. Entre deux entraînements, les soldats de la division « Daguet », qui ont tous adopté le « bob » comme signe distinctif, tentent de recréer un semblant de normalité en s’adonnant à différents loisirs : volleyball, jeu d’échecs ou encore lecture. Mais, même lors des temps de repos, le danger n’est jamais bien loin. Les soldats doivent être prêts à tout moment à enfiler leur combinaison de protection en cas d’attaque NBC (nucléaire, biologique et chimique).
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Déminage de la plage de Koweit City par les sapeurs du 17e RGP (régiment de génie parachutiste) et les parachutistes du 13e RDP (régiment de dragons parachutistes) du détachement français et vestiges de l'occupation irakienne. -
Dans le désert en ZDO (zone de déploiement opérationnel) Olive, des CRAP (commando de renseignement et d'action dans la profondeur) se déplacent à bord de VLRA (véhicule léger de reconnaissance et d'appui) débachés, avec des sacs à dos accrochés sur les flancs. -
Lors de la progression des marsouins du 3e RIMa (régiment d'infanterie de marine) vers Al Salman, des soldats irakiens se rendent mains en l'air. -
Les marsouins du 3e RIMa (régiment d'infanterie de marine) investissent la ville d'Al Salman, certains sont en position de tireur couché, armés de fusils d'assaut FAMAS, et appuient d'autres soldats en progression. -
VAB dans un pré au milieu de moutons lors d'une reconnaissance du 2e RIMa (régiment d'infanterie de marine) dans les camps bédouins au nord des positions françaises dans le désert irakien. -
La plage de koweit City avec des barbelés et des pièges. -
Les puits de pétrole en feu aux environs de Koweit city derrière un char irakien T-55 détruit. -
Carcasses de véhicules détruits et abandonnés à la sortie de Koweit City, dont des camions Gaz-66 4x4. Des tissus jonchent le sol. -
Progression de VAB du 3e RIMa (régiment d'infanterie de marine) et de fantassins à travers les lignes irakiennes. -
Deux chars lourds de combat AMX-30 B2 du 4e RD (régiment de dragons) progressent au-delà de la frontière irakienne; celui de gauche vient de tirer. -
Un groupe de combat du 3e RIMa (régiment d'infanterie de marine) fouille le village d'Al Salman. Un marsouin pointe son fusil d'assaut FAMAS dans la direction d'une fenêtre d'où un habitant sort la tête. -
Un groupe de combat du 3e RIMa (régiment d'infanterie de marine) attaque la ville d'Al Salman. -
Jeune bédouin irakien au milieu de son troupeau de moutons dans le désert, près de l'Axe Texas au nord d'Al Salman. -
Une cérémonie symbolique regroupe soldats américains et français sur les bords de l'Euphrate. -
Un légionnaire du 6e REG (régiment étranger du génie) tire au lance-flamme modèle LFP 54. -
Des civils koweitiens dans la rue vus par une fenêtre cassée depuis l'intérieur carbonisé de l'hôtel Sheraton détruit par les militaires irakiens. -
Le fort d'Al Salman.
Tempête du désert : l’offensive terrestre éclair
Les différentes armées de la coalition, suspendues aux décisions politiques, se préparent à une opération d’envergure sans savoir si celle-ci aura lieu, encore moins quand. Le 29 novembre, l’ONU autorise les coalisés à recourir à la force contre l’armée irakienne si celle-ci n’a pas quitté le territoire du Koweït après le 15 janvier 1991. L’opération « Tempête du désert » (Desert Storm) est officiellement déclenchée le 17 janvier : elle durera 43 jours. Elle commence par une offensive aérienne de plus d’un mois dont l’objectif est d’affaiblir l’armée irakienne afin de préparer l’offensive terrestre. Au bout d’une semaine de combats circonscrits au seul territoire occupé du Koweït, les coalisés obtiennent l’autorisation de l’ONU d’attaquer le sol irakien.
L’offensive terrestre est lancée le 24 février. Les troupes progressent rapidement : le lendemain du début de l’opération, l’aéroport d’As-Salman est pris par les soldats français, qui font de nombreux prisonniers. Koweït City est libérée le 27 février, obligeant l’Irak à se rendre après seulement quatre jours d’offensive éclair. Le 28 février, Saddam Hussein est contraint d’accepter les résolutions votées par le Conseil de Sécurité de l’ONU et de quitter le Koweït. Un long travail attend encore les soldats de la coalition, qui doivent assurer la sécurité de Koweït City et de ses habitants. Leur principale mission : déminer la plage piégée avec des centaines d’engins explosifs par les forces irakiennes qui craignaient un débarquement des coalisés.
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Interview du lieutenant-colonel Yves Derville, chef de corps du 2e REI (régiment étranger d'infanterie), par des journalistes de Radio France Provence et La Cinq au pied du ferry affrété Danielle Casanova à quai au port de Toulon. -
Le ferry affrété Danielle Casanova accoste au port de Toulon sous le regard des familles en attente sur le quai. -
La foule présente brandit des petits drapeaux français lors du défilé militaire au retour de la division Daguet à Toulon. -
Un soldat du génie retrouve sa famille au pied du ferry affrété Ile de Beauté sur le quai du port de Toulon. -
Pierre Joxe, ministre de la Défense, félicite le général Tanneguy Le Pichon, adjoint du commandant en chef de l'opération Daguet, à l'issue du défilé militaire au retour de la division Daguet dans les rues de Toulon. -
Sur le pont d'envol du TCD (transport de chalands de débarquement) Foudre, un soldat du 3e RHC (régiment d'hélicoptères de combat) retrouve sa famille. -
Une famille salue un proche militaire du 4e RD (régiment de dragons) ou du 6e REG (régiment étranger du génie) revenu à bord du ferry affrété Ile de Beauté dans le port de Toulon.
Le retour au bercail et l’heure du bilan
Malgré sa victoire, la coalition décide d’arrêter ici l’opération et de ne pas marcher sur Bagdad : cela reviendrait à outrepasser le mandat de l’ONU – qui avait pour objectif de libérer le Koweït et non de renverser Saddam Hussein – et risquerait ainsi d’affaiblir l’Irak face à l’Iran, créant alors un nouveau déséquilibre géopolitique au cœur d’un Moyen-Orient déjà très instable. Les soldats français rentrent chez eux quelques semaines après la fin des combats, accueillis en héros par la population qui a pu suivre quasiment en direct le conflit grâce aux toutes récentes chaînes d’information en continu.
L’heure du bilan a sonné pour l’armée française. Ne se limitant pas au décompte des pertes humaines et matérielles – deux militaires de l’armée de Terre sont tombés lors de l’offensive terrestre –, le bilan dressé fait apparaître les lacunes et vulnérabilités d’une armée qui, bien que victorieuse et méritante, doit évoluer. Les chefs de l’armée sauront tirer profit de cette opération riche d’enseignements, notamment dans le domaine de la logistique. Daguet marque ainsi un tournant dans l’histoire de l’armée française, qui abandonne le modèle de la conscription pour se professionnaliser. C’est également à l’issue de cette opération que sont créées différentes entités qui aujourd’hui encore jouent un rôle essentiel dans la vie militaire française, à l’instar du Commandement des Opérations Spéciales (COS), de la Direction du renseignement militaire (DRM) ou encore de la Délégation à l’information et la communication de la défense (DICoD).
Pour aller plus loin
Pour en savoir plus sur l’opération Daguet, découvrez dans notre boutique :
- le livre Daguet, une division française dans la guerre du Golfe
- et le DVD du documentaire Daguet, l’opération qui a transformé l’armée.
Vous pouvez également regarder le webdoc La grande aventure Daguet conçu par l’ECPAD à l’occasion du vingtième anniversaire de l’opération.