La campagne de Tunisie : le Maghreb entre dans la guerre
Réagissant au débarquement allié en Algérie et au Maroc, les troupes allemandes et italiennes envahissent la Tunisie, protectorat français, le 9 novembre 1942. Une course contre la montre décisive s’engage alors pour repousser les forces de l’Axe et reprendre le contrôle de la Méditerranée.
L’opération Torch rebat les cartes au Maghreb
Placée sous l’autorité du gouvernement de Vichy au début de la Seconde Guerre mondiale, la Tunisie, alors protectorat français, est peu touchée par le conflit pendant les deux années qui suivent l’armistice du 22 juin 1940. La situation change radicalement à l’automne 1942 lorsque le Maghreb se retrouve au cœur des priorités militaires des Alliés. L’opération Torch est lancée le 8 novembre 1942 : les troupes américaines et britanniques débarquent au Maroc et en Algérie avec la volonté de prendre le contrôle de l’Afrique du nord, alors sous domination vichyste (Maroc, Algérie, Tunisie) et italienne (Libye). Ils sont aidés dans leur mission par les membres de la Résistance française implantés dans la région, notamment à Alger.
Si les Alliés viennent rapidement à bout de la défense vichyste, le face-à-face avec les soldats allemands et italiens s’annonce plus difficile. Le contrôle du Maghreb est en effet primordial pour les forces de l’Axe car il permet de dominer la mer Méditerranée. L’Allemagne et l’Italie veulent éviter à tout prix que les Alliés s’installent en Afrique du nord car cela leur donnerait un avantage pour débarquer ensuite en Europe.
Pour contrer le débarquement allié lancé le 8 novembre, les armées allemande et italienne décident de concentrer leurs forces en Tunisie, où les Américains et les Britanniques n’ont pas encore pris position. Les premiers soldats de l’Axe arrivent en Tunisie dès le lendemain du débarquement allié. Au total, ce sont 70 000 hommes qui sont envoyés en renfort pour stopper la progression alliée. Après avoir été défaite à El Alamein, Rommel ordonne à son armée de se replier vers la Tunisie en traversant la Libye, augmentant encore les forces en présence de l’Axe.
Les combattants du désert
Bien qu’il applique le cessez-le-feu du 10 novembre, le général Barré, commandant supérieur des troupes de Tunisie, ordonne à ses hommes de se replier à l’ouest pour soutenir une éventuelle opération alliée. À la tête de 10 000 hommes, il prend position dans la région montagneuse de Medjez-el-Bab. La campagne de Tunisie est officiellement lancée le 17 novembre mais le premier accrochage a lieu le 19 novembre, date à laquelle le général allemand Nehring lance un ultimatum à Barré. Malgré un manque criant de matériel et une infériorité numérique, les Français tiennent tête toute la journée du 19 novembre aux attaques allemandes avant de devoir se replier sur Oued Zarga, à l’ouest de la Tunisie, d’où ils poursuivent le combat, bientôt rejoints par différentes unités de l’armée d’Afrique.
L’hiver 1942-43 est éprouvant pour les soldats français et alliés engagés en Tunisie. Ils sont régulièrement bombardés par l’aviation allemande et luttent avec la pluie qui fait s’enliser leurs véhicules dans le sable détrempé. Les soldats doivent s’acclimater à la dure vie dans le désert tunisien. Ils transportent leur matériel avec l’aide de mulets, leurs véhicules ne leur permettant pas de circuler partout dans la montagne. Loin des villes, ils doivent se débrouiller avec le peu de moyens dont ils disposent. Ils ont notamment recours à des pigeons voyageurs pour délivrer certains messages. Ils font preuve d’inventivité pour tromper l’ennemi, en camouflant par exemple leurs pièces d’artillerie avec des cactus.
Positionnées autour de Tunis et de Bizerte, les forces de l’Axe gardent la main durant les premières semaines de la campagne. Les assauts menés par les Alliés, comme celui lancé par les Britanniques sur Tunis à la fin du mois de novembre, sont repoussés. À force d’efforts et soutenus par une aide matérielle croissante, les Alliés parviennent malgré tout à gagner du terrain. Le 18 janvier 1943, ils lancent une offensive qui leur permet d’enfoncer les lignes ennemies, repoussant au début du mois de février les troupes de Rommel au sud de la ligne Mareth, ligne de fortifications construite par les Français avant la guerre et tenue alors par l’armée italienne. L’ennemi ne cède pas pour autant et reprend l’ascendant lors d’une offensive vers Kasserine, mais sans parvenir néanmoins à exploiter son succès.
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Une victoire déterminante
Les forces alliées sont renforcées au fil du conflit, ce qui permet de renverser en leur faveur l’équilibre des forces. Placées sous le commandement du général de Larminat et du général Leclerc, les Forces françaises libres rejoignent la campagne en février 1943. Les Alliés lancent une grande offensive le 16 mars 1943, connue aujourd’hui sous le nom de bataille de Mareth. Tandis que les Américains s’élancent vers Gabès, les Français concentrent leurs efforts sur la dorsale orientale tunisienne. L’armée allemande est contrainte d’abandonner la ligne Mareth, dont les 100 kilomètres sont trop difficiles à protéger, pour se replier vers le nord du pays à la fin du mois de mars. C’est dans cette partie du pays, entre Bizerte et Cap Bon, que va se jouer l’issue du conflit.
Les Alliés s’élancent à la conquête du nord de la Tunisie afin de remporter la victoire finale. Ils essuient un échec le 22 avril lors de leur première offensive mais parviennent à atteindre leur objectif le 6 mai grâce à d’importants soutiens aériens. Ils entrent dans Tunis et Bizerte le lendemain, où résistent encore quelques soldats ennemis. Ces derniers se rendent quelques jours plus tard, le 13 mai, date qui marque la fin de la campagne de Tunisie.
Cette victoire est primordiale à plusieurs titres pour les Alliés, malgré des pertes importantes (60 000 hommes tués, blessés ou disparus). Les armées allemande et italienne sont amputées de 250 000 de leurs soldats, faits prisonniers. Plus important encore, les forces de l’Axe sont repoussées hors d’Afrique, permettant ainsi aux Alliés de reprendre le contrôle de la Méditerranée. Ils ont désormais le champ libre pour préparer de futures opérations, dont un débarquement en Italie et dans le sud de la France, qui contribueront à libérer l’Europe.
Maxime Grandgeorge
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