La bataille de Crèvecœur en 1951
Engagée dans la guerre de Corée au sein des Nations Unies, l’armée française prend part à la bataille de Crèvecœur de septembre à octobre 1951. Les images rapportées par les photographes de l’armée française témoignent de la dureté d’une opération au cours de laquelle 60 Français trouvèrent la mort.
Les soldats français au cœur de la guerre de Corée
Annexée par le Japon depuis 1910, la Corée est libérée par les armées américaines et soviétiques en 1945, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Mais cette libération ne marque pas pour autant le retour à la normale pour la péninsule coréenne, qui reste sous la tutelle des États-Unis et de l’URSS. Les dissensions entre les deux camps aboutissent à la proclamation de la République de Corée, dans la partie sud du pays, le 15 août 1948, suivie de celle de la République populaire démocratique de Corée, le 9 septembre 1948.
Loin de se satisfaire de cette partition, les deux Corée revendiquent chacune le contrôle de l’ensemble du territoire coréen. Le 25 juin 1950, la Corée du Nord, encouragée par la Chine communiste, décide de passer à l’action et envahit la Corée du Sud. Débute alors un conflit qui durera trois ans, auquel prendront part plusieurs puissances occidentales à travers l’Organisation des Nations unies (ONU).
L’une des batailles les plus meurtrières pour le bataillon français de l’ONU
À l’été 1951, un an après le début de la guerre de Corée, les combats, bloqués au niveau du 38ème parallèle, commencent à s’essouffler. Les parties prenantes entament des négociations pour mettre fin aux hostilités, sans pour autant ordonner un cessez-le-feu. Malgré les pourparlers, les opérations se poursuivent. Le 13 septembre 1951, les forces d’intervention de l’ONU lancent une attaque dans le secteur du « Punchbowl », sur la cote 931. Constatant l’état dans lequel les combats laissèrent ce lieu, le général américain Matthew Ridgway le renomma « Heartbreak », donnant ainsi son nom à la bataille de Crèvecœur.
Créé le 25 août 1950 par le gouvernement de René Pléven, durant la présidence de Vincent Auriol, le bataillon français de l’ONU participa à cette opération difficile aux côtés notamment de la 2e division d’infanterie américaine. Le piton Crèvecœur fut enlevé aux Nord-Coréens le 13 octobre 1951, après un mois de combats meurtriers : 60 Français y trouvèrent la mort, soit environ la moitié des soldats français engagés sur cette opération, ainsi que plus de 3 000 Américains.
Des paysages calcinés
Les photographies réalisées par le bataillon français de l’ONU, en particulier par le sous-lieutenant Pierre Collard, témoignent de la violence des combats menés à Crèvecœur entre septembre et octobre 1951. On découvre un massif montagneux dévasté et quasi-désertique : la terre est éventrée par les obus à de nombreux endroits, tandis que la végétation semble avoir quasiment disparu, seuls quelques troncs d’arbres dénudés subsistant au milieu d’un paysage lunaire. Les clichés nous renseignent également sur le type d’armes utilisées pendant le conflit (mitrailleuses lourdes, tirs de mortiers et largage de napalm).
Les photographies de Pierre Collard nous offrent un précieux et touchant témoignage sur la vie des soldats français participant à la bataille de Crèvecœur. À l’instar de cette photographie où l’on peut voir un soldat en train d’écrire une lettre, assis dans un campement de fortune, avant de partir à l’assaut. La légende d’origine parle même d’une « dernière lettre », mettant ainsi en exergue le caractère périlleux de l’opération menée, au cours de laquelle le bataillon français paya un lourd tribut. Parmi les victimes figure le capitaine Robert Goupil, tombé au combat le 26 septembre, à l’âge de 30 ans. Un pont fut baptisé en son honneur à Crèvecœur.