Les défilés du 14 juillet qui n’ont pas eu lieu sur les Champs-Élysées

Depuis un peu plus d’un siècle, l’avenue des Champs-Élysées est devenue indissociable de la fête nationale du 14 juillet, date à laquelle elle accueille – presque toujours – le défilé de l’armée française.

La tradition du défilé militaire est aussi ancienne que la fête du 14 juillet. C’est en 1880 que les élus républicains, souhaitant asseoir l’autorité et la légitimité de la Troisième République, déclarent la date du 14 juillet « fête nationale ». Le choix de la date est hautement symbolique puisqu’il renvoie à deux événements majeurs de la Révolution française : la prise de la Bastille (14 juillet 1789) et la première fête de la Fédération (14 juillet 1790).

Organisé le 14 juillet 1880, le premier défilé militaire se déroule à l’hippodrome de Longchamp. Situé sur l’ancien domaine de l'abbaye royale de Longchamp, ce lieu est avant tout pratique : il permet en effet d’accueillir un large public et facilite la circulation des troupes. C’est à cet emplacement que le défilé a lieu jusqu’en 1914, avant d’être interrompu durant la Première Guerre mondiale.

Des cérémonies militaires de moindre envergure sont néanmoins organisées entre 1915 et 1918 à l’occasion de la fête nationale. Celles-ci ont parfois lieu non loin des Champs-Élysées : en 1916, des troupes étrangères alliées défilent entre le Petit et le Grand Palais ; deux ans plus tard, ce sont des fusiliers marins qui investissent la place de la Concorde. Pour la revue de 1917, ce sont la place de la Nation et le cours de Vincennes qui sont choisis.

Il faut attendre que la guerre soit finie pour voir à nouveau défiler, en grande pompe, les troupes françaises, le 14 juillet 1919. Le gouvernement choisit l’avenue des Champs-Élysées pour organiser cette fête de la Victoire. Les troupes défilent sous l’Arc de Triomphe, là où la tombe du soldat inconnu sera installée un an plus tard.

Le dispositif sur les Champs-Élysées est reconduit de 1920 à 1924. Malgré la popularité grandissante de l’événement, la cérémonie se voit réduite et cantonnée à la place de l’Étoile entre 1925 et 1928. Ni revue ni défilé ne sont proposés en 1929. Entre 1930 et 1934, ainsi qu’en 1936, les troupes paradent du pont Alexandre III jusqu’à la Concorde, ne descendant ainsi qu’une toute petite portion de la célèbre avenue.

En 1935, le défilé militaire a bien lieu sur les Champs-Élysées mais il est quelque peu éclipsé par la manifestation populaire organisé par les forces politiques du futur Front populaire. Le 14 juillet après-midi, 500 000 personnes défilent de la Bastille à la Porte de Vincennes pour manifester contre les ligues factieuses.

Entre 1940 et 1944, l’occupation allemande met à nouveau un terme au défilé du 14 juillet. Il faut attendre la fin de la guerre pour que l’armée française, victorieuse, défile à nouveau le 14 juillet 1945. La cérémonie militaire est organisée dans différents endroits de la capitale, des Champs-Élysées jusqu’à la place de la Bastille. Ce dispositif est reconduit en 1946. Et c’est à partir de 1947 que la célèbre avenue devient le seul lieu attitré du défilé, et ce pendant de nombreuses années.

Lorsqu’il arrive au pouvoir en 1974, Valéry Giscard d'Estaing souhaite renouer avec les origines révolutionnaires du 14 juillet. Il délocalise le défilé place de la Bastille, dans l’est parisien, plus peuplé et modeste que les abords des Champs-Élysées, ce qui lui permet de faire de ce défilé un pivot du lien armée-Nation. Les Français découvrent une cérémonie différente des précédentes durant laquelle les soldats défilent à pied, avec un nombre restreint de véhicules.

Valéry Giscard d’Estaing renouvelle l’expérience à plusieurs reprises : la quasi-totalité des défilés militaires du 14 juillet qu’il préside ont lieu hors des Champs-Élysées : entre le cours de Vincennes et la place de la Nation en 1975 ; à l’École militaire en 1977 ; entre la place de République et la place de la Bastille en 1979.

C’est en 1980, à l’occasion du centenaire de l’institution du14 juillet comme fête nationale, que le défilé réinvestit les Champs-Élysées. La tradition sera définitivement instituée l’année suivante par François Mitterrand, élu en 1981. Le défilé ne quittera plus l’avenue qui relie l’Arc de Triomphe à la place de la Concorde.

Au début de l’année 2020, la France est frappée par la pandémie de Covid-19. Afin de limiter la propagation du virus et de soulager les services de santé, les rassemblements de population sont limités. Et comme l’épidémie est toujours présente au début de l’été, le défilé du 14 juillet a lieu en format réduit sur la place de la Concorde. La cérémonie organisée rend hommage aux civils et militaires engagés dans la lutte contre le Covid-19.

En 2024, pour la deuxième fois sous la présidence d’Emmanuel Macron, le défilé du 14 juillet n’aura pas lieu sur les Champs-Élysées. En effet, afin de ne pas perturber l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, la cérémonie se déroulera sur l’avenue Foch, non loin des Champs-Élysées. La place de l’Étoile reste néanmoins le point de départ.