Bételgeuse : une démonstration de force gaullienne
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Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
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Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française). -
Déclenchement de l'essai nucléaire Bételgeuse par le général de Gaulle à Moruroa (Polynésie française).
Premier tir nucléaire français réalisé sous ballon captif, Bételgeuse prouve que la France est une nation puissante et indépendante capable d’assurer sa défense. Une démonstration de force à laquelle le général de Gaulle, fervent partisan du nucléaire, donne tout son poids.
De Gaulle, chantre du nucléaire
Conscient du formidable potentiel offert par le nucléaire, tant du point de vue scientifique et industriel que militaire, le général de Gaulle missionne en septembre 1945 Frédéric Joliot-Curie et Raoul Dautry, respectivement directeur du CNRS et ministre de la Reconstruction et de l'Urbanisme, pour créer un organisme de recherche spécialisé dans l’énergie nucléaire. Le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) voit le jour quelques mois plus tard, le 18 octobre 1945.
Les recherches du CEA sont quasi exclusivement dédiées à l’usage civil et industriel de l’énergie nucléaire durant les premières années d’existence de l’organisme. Il faut attendre la fin de l’année 1954 pour que Pierre Mendès-France, alors Président du Conseil, lance un programme de conception d’armes nucléaires. De retour au pouvoir en 1958, le général de Gaulle poursuivra cet ambitieux programme grâce auquel la France deviendra la quatrième puissance mondiale à maîtriser la force de l’atome.
Les premiers essais nucléaires français sont réalisés sous la présidence du général de Gaulle en 1960. Les expérimentations se déroulent en Algérie, dans le désert du Sahara. Mais la signature des Accords d’Évian le 18 mars 1962, qui mettent fin à la guerre d’Algérie et ouvre la voie à l’indépendance de l’ancienne colonie, obligent les autorités françaises à délocaliser les essais. La France réalisera une dizaine de tirs souterrains jusqu’en 1966 avant de quitter définitivement ses bases militaires en Algérie. C’est sur la Polynésie française, située de l’autre côté du globe, que les pouvoirs publics jettent leur dévolu pour poursuivre les expérimentations.
Un gros ballon jaune dans le ciel polynésien
Contrairement aux essais atmosphériques réalisés précédemment, depuis une tour dans le désert saharien et depuis une barge à Mururoa pour le tir Aldébaran effectué le 2 juillet 1966, l’essai Bételgeuse est le premier à être réalisé depuis un ballon. Cette technique, qui avait déjà été expérimentée avec succès par les États-Unis, a pour avantage de limiter la contamination produite par l’explosion, celle-ci étant ici éloignée de plusieurs centaines de mètres de la surface terrestre.
Ce mode de tir, nouveau pour l’armée française, s’inspire des ballons captifs, technique développée à la fin du XVIIIe siècle et fréquemment utilisée pendant la Première Guerre mondiale. Des ingénieurs du début du XXe siècle ont d’ailleurs participé à l’élaboration du projet, faisant profiter les membres du projet de leur savoir. Onze kilomètres de tissu ont été nécessaires pour construire ce ballon, entièrement confectionné à la main. Long de 70 mètres, le ballon est aussi haut qu’un immeuble de sept étages. Sa couleur jaune et sa forme allongée, qui ne sont pas sans rappeler le yellow submarine des Beatles, ne passent pas inaperçues !
Les préparatifs de l’essai débutent le 9 septembre 1966, la veille de la date initiale du tir, mais sont marqués par divers incidents techniques. Des fuites ont été repérées dans l’un des stabilisateurs du ballon, obligeant ce dernier à être ramené au campement pour être réparé. Les conditions météorologiques s’étant détériorées entre-temps, il faut attendre le lendemain pour procéder à la réparation. Les équipes n’ont pas d’autre choix que de reporter le lancement au 11 septembre.
Une démonstration de force
La pression est plus grande sur les épaules des organisateurs pour cet essai que pour les deux précédents, pas tant à cause de la nouveauté du procédé utilisé qu’à cause de la présence d’un invité de marque : le président de la République en personne. Malgré l’importance de l’événement, la presse n’a pas été conviée pour des raisons de sécurité ; elle le sera l’année suivante pour le lancement du premier sous-marin nucléaire français, le Redoutable. Le moment a néanmoins pu être immortalisé grâce aux photographes et caméramans des armées.
La présence du chef de l’État, qui n’avait pas assisté au premier tir réalisé en Polynésie française quelques mois plus tôt, n’est pas anodine. Le général de Gaulle veut montrer au monde que la France, qui a quitté en mars 1966 le commandement intégré de l’OTAN, est une puissance qui compte dans le concert des Nations. L’essai semble d’ailleurs éveiller la curiosité des « rivaux » nucléaires, notamment celle des États-Unis, dont un avion volant à proximité de la zone du tir a été intercepté à deux reprises par les avions Étendards du porte-avions Foch.
Installé à bord du croiseur De Grasse, le président de la République, habillé pour l’occasion d’une combinaison de protection blanche, déclenche le tir le 11 septembre 1966 à 7 h 30 du matin. Il assiste à l’essai entouré de différentes personnalités civiles et militaires, dont Pierre Messmer, ministre des Armées, le général Billotte, ministre des Outre-mer, Alain Peyrefitte, ministre de la Recherche scientifique, et le général de corps aérien Jean Thiry, directeur des centres d'expérimentations nucléaires.
Le tir est un succès et permet à De Gaulle de vanter le programme nucléaire français, ainsi que le développement économique dont bénéficie la Polynésie grâce à l’activité du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP). « La Polynésie a bien voulu être le siège de cette grande organisation destinée à donner à la puissance française le caractère de la dissuasion, qui peut et doit, à tous, dans un monde dangereux, nous assurer la paix », déclare-t-il le 16 septembre 1966. Qu’elle l’ait véritablement voulu ou non, la Polynésie fait désormais partie d’une aventure hors du commun qui prendra fin en 1996, marquant pour longtemps encore la région.
Maxime Grandgeorge
Pour aller plus loin
Pour en savoir plus sur les essais nucléaires en Polynésie française, découvrez sur ImagesDéfense le focus :
- Aldébaran : le premier essai nucléaire en Polynésie française
- le documentaire Histoire des essais nucléaires français : du désert de la soif à l'île du grand secret.